Conventions collectives de travail
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Concept
La convention collective de travail est un accord conclu entre une ou plusieurs organisations syndicales et une ou plusieurs organisations patronales ou un ou plusieurs employeurs, dans lequel sont définies les relations collectives et individuelles entre employeurs et travailleurs d'une entreprise ou d'un secteur d'activités et qui régit les droits et devoirs des parties contractantes.
Hiérarchie des sources juridiques du droit du travail
Les conventions collectives de travail et autres sources juridiques peuvent contenir des dispositions contradictoires, et c'est pourquoi il est utile de faire référence à la hiérarchie, légalement définie, entre les sources juridiques qui régissent les relations de travail. Cette hiérarchie est décrite dans la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires[1].
Cette hiérarchie a été définie comme suit :
- les dispositions impératives de la loi ;
- les CCT rendues obligatoires, dans l'ordre suivant :
- les conventions conclues au Conseil
National du Travail
- les conventions conclues dans une
commission paritaire
- les conventions conclues dans une
sous-commission paritaire ;
- les conventions collectives de travail qui ne sont pas rendues obligatoires, lorsque l'employeur ayant conclu la convention a adhéré ou est affilié à une organisation ayant signé cette convention, dans l'ordre suivant :
- les conventions conclues au Conseil
National du Travail
- les conventions conclues dans une
commission paritaire
- les conventions conclues dans une
sous-commission paritaire ;
- l'accord écrit individuel ;
- la convention collective de travail qui n'est pas rendue obligatoire, conclue dans un organe paritaire, lorsque l'employeur, bien qu'il n'ait pas signé la convention ou ne soit pas affilié à une organisation signataire, ressortit à l'organe paritaire au sein duquel la convention a été conclue ;
- le règlement de travail ;
- les dispositions auxiliaires de la loi ;
- l'accord individuel oral ;
- l'usage.
Cette hiérarchie démontre clairement la priorité des dispositions réglementaires collectives sur les dispositions contractuelles individuelles.
Cette hiérarchie n'exclut cependant pas la possibilité de prévoir des dispositions plus favorables pour les travailleurs au sein de conventions collectives conclues à un niveau inférieur. En effet, généralement, les conventions collectives signées à un niveau supérieur comportent une réglementation minimale. Toutefois, si une convention collective conclue à un niveau supérieur établit une règle maximale, il ne peut y être dérogé dans une convention collective d'un niveau inférieur, même si cette dernière est plus favorable pour les travailleurs.
Parties
Les organisations représentatives des employeurs
Les organisations interprofessionnelles représentatives créées pour l'ensemble du pays et représentées au CNT.
Les organisations représentatives des travailleurs
Les organisations interprofessionnelles créées pour l'ensemble du pays, représentées au sein du Conseil Central de l'Économie et du Conseil National du Travail et comptant au moins 50.000 membres. Dans la pratique, il s'agit donc de la FGTB, de la CGSLB et de la CSC.
Les représentants de ces organisations sont réputés compétents pour conclure la convention au nom de leur organisation.
Contenu
Une CCT peut régir les matières les plus diverses. On fait une distinction entre :
Les dispositions obligatoires
Il s'agit des droits et devoirs des parties ayant
conclu la convention.
Cela concerne notamment :
- l'obligation de paix : les parties concernées doivent s'abstenir, pour la durée de la convention, d'exercer une pression visant à modifier la convention ou à mettre son existence en danger. L'obligation de paix est toujours d'application, même lorsqu'elle n'est pas mentionnée explicitement dans la CCT.
- l'obligation d'influence : les parties signataires ont l'obligation de convaincre leurs membres d'appliquer la CCT.
Les dispositions normatives
Elles régissent les relations entre employeurs et travailleurs. Elles peuvent être individuelles (salaires, primes, durée de travail, ...) ou collectives (création et statut de la délégation syndicale, dispositions en matière de sécurité et de santé, ...).
Où conclut-on une C.C.T. ?
On peut conclure une CCT soit au sein d'un organe paritaire, soit en dehors d'un organe paritaire. Au niveau national (l'ensemble du pays) et interprofessionnel, les CCT sont conclues au sein du CNT. Au niveau professionnel (l'ensemble du pays, un secteur déterminé), elles sont conclues dans les commissions et sous-commissions paritaires.
Les CCT conclues au niveau de l'entreprise sont réputées conclues en dehors d'un organe paritaire. Pour la conclusion d'une CCT en dehors d'un organe paritaire, la collaboration d'une seule organisation représentative des travailleurs est suffisante.
La CCT d'entreprise doit être signée par le permanent d'au moins une organisation représentative des travailleurs. Ni les représentants des travailleurs au conseil d'entreprise ou au comité pour la prévention et la protection au travail, ni la délégation syndicale ne peuvent signer une convention d'entreprise.
Champ d'application des conventions collectives de travail
Le champ d'application varie en fonction de l'instance au sein de laquelle la convention a été conclue et de la volonté des parties.
Caractère obligatoire des CCT
La convention est obligatoire pour :
les organisations qui l'ont signée et les employeurs membres de ces organisations ou qui ont conclu la convention, dès la date d'entrée en vigueur ;
l'organisation et les employeurs adhérant à la convention et les employeurs membres de ladite organisation, dès l'adhésion ;
les employeurs qui deviennent membres d'une organisation qui s'est engagée, dès leur affiliation ;
tous les travailleurs d'un employeur qui s'est engagé.
Toutes ces personnes sont liées par les dispositions normatives (tant individuelles que collectives) de la convention. Elles ne peuvent y déroger, pas même au moyen d'un contrat de travail.
Pour tous les autres employeurs et travailleurs ressortissant à la commission paritaire et pour autant que ceux-ci tombent dans le champ d'application de la convention, cette dernière, conclue dans un organe paritaire, a un effet obligatoire supplétif[2] en ce qui concerne les dispositions individuelles normatives. Lesdits employeurs et travailleurs peuvent déroger à la CCT si cela figure expressément, par écrit, dans le contrat de travail individuel.
Force obligatoire générale
Une CCT conclue dans un organe paritaire (Conseil National du Travail, commissions et sous-commissions paritaires) peut être rendue obligatoire.
La CCT est rendue obligatoire à la demande des organisations représentées dans l'organe paritaire, par le biais d'un Arrêté Royal, après examen par le Ministre de l'Emploi et du Travail et sous sa responsabilité. L'A.R., accompagné du texte de la CCT en annexe, est publié au Moniteur Belge.
Après que la CCT ait été rendue obligatoire, tous les employeurs, ainsi que les travailleurs que ceux-ci occupent et qui sont visés par la CCT, sont liés de façon impérative par les dispositions normatives de la CCT. Les employeurs qui ne sont pas membres d'une organisation signataire n'ont plus la possibilité de déroger aux dispositions d'une CCT par un contrat de travail écrit individuel. Des sanctions pénales sont prévues en cas de non-respect des dispositions normatives.
Forme et mentions obligatoires
La CCT doit être écrite. Elle doit être rédigée en français et en néerlandais, sauf si elle n'est valable que pour une zone linguistique.
Les mentions obligatoires figurent à l'article 16 de la Loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires.
Si les exigences en matière de forme et de mentions obligatoires ne sont pas respectées, le dépôt sera refusé.
Dépôt
Une CCT conclue dans un organe paritaire ou en dehors d'un organe paritaire doit être déposée au greffe du Service des relations collectives de travail du Ministère de l'Emploi et du Travail.
Le dépôt est une exigence de forme substantielle, de sorte que la CCT est inexistante en tant que telle en cas d'absence de dépôt et ne tombe pas sous l'application de la loi du 5 décembre 1968. La signification extrêmement limitée d'une telle convention sera alors celle d'un simple accord.
Surveillance et sanctions
Outre les officiers de la police judiciaire, le contrôle du respect des conventions collectives est exercé par la Direction générale Contrôle des Lois Sociales.
Sont punis d'un emprisonnement de huit jours à un mois et/ou d'une amende de 26 à 500 euros, l'employeur coupable d'infraction à une convention rendu obligatoire et quiconque qui a fait obstacle à la surveillance.[3] A partir du 30 juin 2015, est puni d'une sanction de niveau 1[4], l'employeur (son préposé/mandataire) qui, en contravention à la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, a commis une infraction à une convention collective de travail rendue obligatoire qui n'est pas déjà sanctionnée par un autre article du Code pénal social.[5]
A partir du 1er janvier 2017 le législateur a augmenté les décimes additionnels. Les amendes administratives ainsi que les amendes pénales doivent être multipliées par un coefficient 8 (au lieu de 6). Dans le Code pénal social les infractions sont divisées en quatre catégories. Les quatre catégories d'amendes, les décimes additionnels inclus, sont :
Niveau 1
- amende administrative de 80 à 800 EUR.
Niveau 2
- amende pénale de 400 à 4.000 EUR ou ;
- amende administrative de 200 à 2.000 EUR.
Niveau 3
- amende pénale de 800 à 8.000 EUR ou ;
- amende administrative de 400 à 4.000 EUR.
Niveau 4
- emprisonnement de 6 mois à 3 ans ;
- amende pénale de 4.800 à 48.000 EUR ou ;
- amende administrative de 2.400 à 24.000 EUR.
[1] Loi
du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les
commissions paritaires, M.B., 15
juillet 1969.
[2] Droit supplétif : des dispositions sont supplétives lorsque les parties à un contrat peuvent y déroger.
[3] Article 56 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, M.B., 15 janvier 1969.
[4] Article 101 juncto articles 102 et 103 Code pénal social.
[5] Article 189 Code pénal social. Les textes des conventions collectives elles-mêmes doivent êtres consultés pour savoir ce qui est punissable.
[6] Loi du 28 décembre 2011 portant des dispositions diverses en matière de justice (II), M.B., 30 décembre 2011.